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28 septembre 2003

Quelles transformations pour les services financiers de proximité ?

par Bernard Mary, Directeur Général du Crédit Agricole du Nord-Est


J'ai 400.000 clients particuliers et 200 points de vente. D'après une enquête récente, 77% du grand public dit ne pas être informé du tout à propos de l'Euro. Je m'attends à un choc culturel, et ce sont les banques de proximité qui l'encaisseront. Nous autres banquiers avons connu récemment des Fusions, qui ont créé des dysfonctionnements que nous avons dû gérer, mais ce qui se prépare va être encore plus « sportif ». il faut comprendre que l'opération n'aura lieu qu'une fois. Il n'est pas question d'échouer, ce serait une catastrophe, or nous n'aurons ni deuxième chance, ni opportunité pour roder ou amortir de gros investissements. Dans mon seul cas, je prévois plus de 10.000 hommes-jours à dépenser.

Nous avons quatre grands types de clients : entreprises, professionnels, patrimoniaux et grand public.

il n'y aura guère de problème avec les grandes entreprises, ou les PME pratiquant déjà le commerce international. Les autres, en revanche, commencent à peine à découvrir ce qui les attend.

Les « professionnels », ce sont les artisans, commerçants et libéraux. Ils vont devoir redéfinir leurs gammes de produits et leurs tarifs, ce qui aura des conséquences juridiques et financières, donc se répercutera sur leurs relations avec leurs banquiers.

Les « patrimoniaux », ce sont ceux qui gèrent une épargne. Ils sont déjà informés et demanderont, dès le début de la période transitoire, les services du futur. Nous devrons nous mettre aux normes bien avant 2002.

Enfin, le grand public. Il s'informera progressivement, mais nous devrons mettre en place les services d'assistance et de conseil que ce public réclamera avant, pendant et après la période de basculement.

L’essentiel, vis-à-vis de la clientèle de proximité, ce sera d'adapter nos offres commerciales. il faudra par exemple livrer des chéquiers en Euro très rapidement, car il ne serait pas possible de traiter des chèques en Francs surchargés par l'émetteur. Il faudra adapter les terminaux de paiement électroniques, les distributeurs de billets, etc. Et je ne vous parle pas des angoisses de ceux qui ont de l'argent dans une lessiveuses enterrée au fond du jardin, cela existe encore... Ce sera une bonne opportunité pour développer la banque à distance, en France et dans l'ensemble de l'Europe.

Les produits de placement administrés (caisse d'épargne, CODEVI, etc.), qui sont nombreux en France, devront disparaître. Les financements (prêt à taux zéro, épargne﷓logement, etc.) aussi.
La facturation des services bancaires changera aussi. Les dates de valeur, ce brouillard pour tromper le client français, vont disparaître. Les avoirs seront rémunérés mais vous devrez payer vos chèques, ce qui avantagera les banques françaises car elles sont moins chères que les étrangères.
Enfin, en interne, nous allons devoir faire un gros effort de formation pour accompagner nos clients. Je m'attends aussi à de vastes tentatives de fraude à l'occasion du grand changement; à titre indicatif, en 1996, il y a eu pour 1,5 milliard de Francs de fraudes sur les opérations bancaires en France.
En tout, je compte que le changement coûtera à chaque banque une année de bénéfice, quand elle fait des bénéfices à un toux normal. Les banques françaises, même si elles sont malades aujourd'hui, ont de très sérieux atouts. La concurrence nouvelle àccélérera les concentrations. Il faudra aller chasser sur les terres de nos concurrents étrangers, mais aussi sur celles de certaines professions voisines, je pense aux assurances... Il y a encore des gains en productivité latents.

Autrice

Bernard Mary

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