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28 septembre 2003

Organiser le passage a l'Euro des sociétés d'assurances

par Patrick Lefas, Directeur des affaires européennes et internationales de la FFSA


L’introduction de la monnaie unique constitue une étape décisive pour les sociétés d'assurances françaises, quant à leur capacité à s'adapter aux nouvelles conditions de concurrence, à réorganiser leurs stratégies de placement et à assimiler les nouvelles exigences techniques du marché. Trois défis majeurs se présentent : le parachèvement du marché unique, l'orientation des flux d'investissement et la démarche concrète d'adaptation.
En effet, une période d'évolution majeure s'ouvre pour le marché unique de l'assurance, tant au regard des conditions de concurrence que des modes de distribution. Par ailleurs le passage à l'Euro représente un enjeu fort pour les assureurs en tant qu'investisseurs institutionnels. Gestion des actifs et politique de placement doivent être progressivement adaptées, et les atouts de la Place de Paris favoriseront cette transition. Enfin, une attention particulière doit être portée à la phase opérationnelle de préparation du marché français de l'assurance à la mise en place de la monnaie unique. Des considérations juridiques et statistiques viennent en ce domaine s'ajouter à l'exigence d'un examen préalable de l'ensemble des branches de risque et des opérations de gestion collective.

C'est au travers d'une prise en compte adaptée des questions soulevées par ce rapide panorama que les sociétés d'assurances françaises pourront tirer profit au mieux des perspectives de l'introduction de la monnaie unique.
Depuis plusieurs mois, les mutations du marché unique européen de l'assurance sont sensibles. L'ouverture des marchés nationaux est de plus en plus manifeste, alors que les mouvements de concentrations se multiplient. Parallèlement les modes de distribution se renouvellent et génèrent une concurrence accrue.
Pour se convaincre de l'harmonisation croissante des marchés au niveau communautaire citons seulement la libéralisation récente des tarifs automobile en Italie ou encore la suppression en droit des monopoles régionaux incendie en Allemagne. il n'est en outre nullement nécessaire de s'attarder sur la liste toujours plus longue des concentrations au sein de l'Union Européenne, tant au niveau des entreprises d'assurance (UAP/Axa, Royal/Sun Alliance, Scottish Amicable/Prudential ... ), que de réassurance (Abeille RE/Axa Re, Eisen und Stahl Rück/Hannover Rück, SAFR/Partner Re, Mercantile & General/Suisse Re ... ), ou de courtage (JIB Group/Lloyd Thompson, Bain Hogg/Alexander and Alexander/AON Group, CECAR/Marsh Mdennan ... ). Le renforcement de la concurrence s'opère enfin au niveau des intermédiaires - qui se professionnalisent et s'appuient sur de nouveaux vecteurs de distribution (téléphone, Internet, bornes automatiques ... ) - mais aussi entre places d'assurance et places financières.
La mise en place de l'Euro constitue dans ce phénomène d'intégration croissante du marché unique un facteur d'accélération manifeste.
Elle est également un déterminant majeur pour les investisseurs, qui - dans le cadre de règles prudentielles adaptées - devront infléchir progressivement leurs politiques de placement.
Au préalable, l'organisation de la gestion financière des actifs par les sociétés d'assurance doit être revue, avec une centralisation et une spécialisation accrues, et le recours à des conseils extérieurs sur certains segments déterminés de titres. Parmi les normes prudentielles communautaires imposées aux sociétés d'assurance, la monnaie unique n'aura aucun impact sur le respect de la marge de solvabilité ou la dispersion des actifs mais réduira le principe de congruence au risque de crédit (éliminant le risque de change) et donnera sa pleine application à la règle de localisation des actifs si le système d'échanges est performant. La répartition de l'encours des placements des sociétés d'assurances françaises (FRF 3 015 milliards en 1996) devra en conséquence progressivement converger vers celle de leurs homologues européens, alors même que de très importantes disparités persistent, entre autres quant à la part des prêts, des actions ou des obligations (72% du portefeuille des assureurs français). Dans cette perspective, I’ouverture, le haut niveau de liquidité et de sécurité, l'environnement économique, juridique et prudentiel internationalement reconnu et la qualité des produits et services du marché parisien offrent autant d'atouts susceptibles de faciliter la période de transition vers l'Euro.
Les sociétés d'assurance françaises se doivent ainsi de participer à l'élaboration du schéma de place bancaire et financière dans une perspective communautaire.

La phase opérationnelle de préparation du marché français de l'assurance à la mise en place de la monnaie unique apparaît alors comme l'ultime finalisation d'un processus institutionnel et économique.
La rédaction d'un vade﷓mecum Euro pour la profession d'ici l'été 1998 nécessite l'adoption d'une méthode systématique. Outre le recours à des consultants, un comité de pilotage et des groupes de projet devront être
mis sur pied afin que puisse être passé en revue l'ensemble des branches de risque et des opérations de gestion collective (BCR, conventions, BCAC ... ). La conversion à l'Euro devra être organisée par branche, avec la distinction par segment de clientèle pour l'assurance﷓dommages (dès 1999 pour les entreprises mais pas avant 2002 pour les particuliers), la reconnaissance d'une certaine porosité liée au basculement des marchés Financiers pour l'assurance﷓vie et la prise en compte adéquate de la date de conversion des bulletins de salaires et des déclarations sociales pour l'assurance﷓santé.
Enfin certains problèmes techniques devront être traités : la continuité des indices de taux, la continuité juridique des contrats, les règles de conversion d'arrondis, la collecte des données statistiques et le bon fonctionnement des organismes professionnels, les modifications éventuelles du code des assurances ...

Autrice

Patrick Lefas

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